You… give me fever… [R]

Heureusement pour les deux jeunes gens, le gardien de l’école, bien qu’adorable, avait un goût fort prononcé pour le vin italien et ce petit penchant lui faisait quelques fois oublier de fermer les portes après ses inspections, comme c’était le cas ce soir là. Chose dont ils étaient tous deux au courant mais il leur avait toujours manquer l’audace pour franchir le pas et oser s’aventurer dans cet endroit devenant paradisiaque les temps de canicule.

« La voix est libre… » chuchota le jeune homme bien qu’ils soient délicieusement seuls.

Il serra un peu plus l main de Beth dans la sienne, appréciant l’agréable sensation qui l’envahissait au contact de la peau de la ballerine. Là sous le halo pâle de la lune, avec son t-shirt géant et ses cheveux épars sur ses épaules graciles elle avait quelque chose de réellement… troublant… et de terriblement irrésistible.

A tâtons, ils trouvèrent le chemin des vestiaires qui résonnaient de leurs chuchotements nerveux et de leur crise de fous rires à peine contrôlées. On aurait dit deux gamins partis en expédition pour chiper la boîte de cookies qui se trouvait toujours sous haute surveillance dans la cuisine et qui représentait à cet âge l’ultime tentation...

« Prête pour la grande aventure ? » fit-il en haussant un sourcil et en tentant de réprimer le sourire qui gagnait ses lèvres vermeilles.

Il l’avait inconsciemment, enfin il essayait de se persuader qu’il l’avait inconsciemment attirée à lui et que le trouble qui l’envahissait lentement n’était du qu’a la chaleur qui régnait à l’extérieur et qu’ils oublieraient bientôt en faisant trempette dans l’eau glacée.

Mais la tâche était ardue d’autant plus que la traîtresse avait la peau délicieusement douce et un parfum réellement envoûtant. Il accrocha son regard émeraude à celui de la danseuse et le sourire qui s’était affiché sur ses lèvres s’estompa.

« Beth...» murmura-t-il, la voix légèrement rauque, mettant à nouveau une distance un peu plus respectable entre eux.

La jeune femme piétinnait d'impatience devant la porte vitrée, qu'à son plus grand soulagement, Enzo ouvrit sans peine. Décidemment, ce gardien au nez toujours pourpre était l'un de leurs plus fidèles alliés... Sa main toujours dans celle d'Enzo, elle le suivit à l'intérieur du bâtiment, refermant avec soin et silence la porte derrière eux, et, étouffant un fou-rire, elle se retourna vers le jeune homme un les lèvres étirées en un sourire rayonnant. La main du jeune italien était fraîche, sûrement à cause de ses cheveux encore mouillés et de son tee-shirt qui lui collait à la peau. A le voir ainsi, Bee n'avait pas le souvenir d'avoir un jour remarqué à quel point sa musculature était développée. Disons qu'en fait, elle venait sincèrement de s'apercevoir qu'Enzo était bien un homme, mâle dans toute sa puissance, et plus cet ami presque asexué auquel elle pouvait parler de tout...

"Plus que jamais !" répondit-elle vivement alors qu'ils s'engouffraient dans les vestiaires.

Puis, sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte, la distance entre elle et Enzo s'était amenuisée, tant et si bien qu'elle pouvait sentir sa respiration caresser son visage. Cette sensation qui l'envahissait, ce désir qui venait soudainement brûler l'intérieur de son bas-ventre, elle la connaissait bien, mais pas pour l'avoir déjà éprouvé pour Enzo... Réfrénant ce qu'elle ne devait pas vivre, elle se râcla la gorge rapidement dans le même moment qu'Enzo s'éloigna d'elle, et esquissant l'ombre d'un sourire gêné, elle s'enfonça un peu plus dans les vestiaires.

Sa main ne tenait plus celle d'Enzo, et ce n'était finalement pas plus mal, essayait-elle de se convaincre. Après avoir marché dans l'obscurité, un pâle halo lumineux leur indiquait que les douches, et par conséquent, la piscine, n'était plus très loin. Accélérant le pas, Bee pénétra dans les douches, et longea les parois, passant sous les pommeaux de douche. Mais ses pieds nus rencontrèrent une dalle humide, et la jeune femme manqua de tomber, se retenant à un robinet qu'elle tourna, et bientôt un jet d'eau brûlante s'abattit sur eux deux...

Le jeune homme resta un moment interdit, alors que la jeune femme disparaissait de son champ de vision pour s’enfoncer un peu plus dans la pénombre qui avait envahie les lieux. Il passa une main sur sa nuque, essayant de chasser les fugitives images que ce bref, mais brûlant rapprochement avait fait naître en lui. Beth était une amie de longue date, il la connaissait depuis qu’elle avait commencer ses études ici et avait passé des tas de moments extra avec elle mais leur relation était toujours restée amicale, plate…

Il se retourna enfin vers elle, reprenant un peu ses esprits et essayant tant bien que mal de chasser cette chaleur diffuse qui venait de l’envahir et le mettait dans une situation où il se retrouvait presque trop à l’étroit dans son jean. En quelques enjambées il était à nouveau proche d’elle, gardant tout de même un ou deux mètres par prudence… Par prudence ? depuis quand devait-il éviter tout contact avec elle ?

Sans doute depuis qu’elle s’était présentée devant lui dans ce t-shirt qui au lieu de masquer ses formes ne faisait que révéler la splendeur de son corps et la délicatesse de son épaule sur la quelle s’obstinait de glisser le tissu, comme une terrible invitation à l’en débarrasser pour éviter toute gêne superflue.

Il était cependant suffisamment proche pour la rattraper délicatement quand elle faillit chuter sur le marbre des dalles des douches. Il ne fut cependant pas assez rapide et elle se raccrocha au robinet d’une des douches, faisant jaillir un jet d’eau brûlante, l’exact contraire de ce qu’ils attendaient en venant ici.

« Tout va bien ? » demanda-t-il

Tout en la serrant d’avantage contre lui, bien plus qu’il n’était nécessaire à n’en pas douter alors que l’eau ruisselait sur les deux corps et imprégnait leur vêtement les plaquant à leur peau, laissant apparaître ce qu’ils dissimulaient avec peine quelques instants auparavant. La tenant serrée d’une main, il avança l’autre vers son visage et en dégagea la mèche qui lui brouillait la vue. Il accrocha son regard une ultime fois, avant de l’attraper avec force et de la plaquée contre le mur tout en capturant ses lèvres dans un baiser passionné.

Beth eut le souffle coupée lorsqu'Enzo la prit dans ses bras, et elle dut expirer avec lenteur pour reprendre un souffle qui lui manquait déjà. L'eau ruisselait sur le visage d'Enzo, gouttant de ses cheveux, rendant son tee-shirt transparent et trop étroit. Une goutte d'eau tomba sur le front de l'italien, descendant en suivant le tracé de son nez, glissant sur ses lèvres avant de tomber sur la peau brûlante de Beth, puis d'aller se cacher vers son décoletté... Suivant cette goutte d'eau du regard, la jeune femme sut qu'elle ne retiendrait plus cette chaleur ardente qui se diffusait depuis son bas-ventre vers toutes les parties de son corps. Sentir sa peau nue contre la sienne, voilà ce qu'elle désirait...

Etouffant un gémissement dans le baiser que vint déposer Enzo sur ses lèvres, la jeune femme l'interrompit un instant, juste le temps de glisser ses doigts sous le tee-shirt du jeune homme et de le lui enlever. Elle jeta le vêtement humide de l'autre côté de la pièce, et attira la bouche d'Enzo contre la sienne en posant sa main contre sa nuque. Elle n'arrivait pas à s'arrêter, emportée par cette fièvre qui ne faisait qu'être attisée à chaque nouvelle caresse, à chaque nouveau contact. Sa main gauche glissa le long des abdominaux du jeune homme, jusqu'à sa ceinture, qu'elle déboucla rapidement. Les gestes de Bee étaient de plus en plus pressants, elle ouvrit la braguette du jean, le déboutonna, et le baissa vivement...

En trois ans, aucun d'eux n'avait un jour imaginé être dans cette situation, et maintenant que c'était le cas, ce goût d'irréel qu'avait leur corps à corps ne le rendait que plus grisant et ils se perdaient dans la volupté de l'instant. Leur esprit étaient descendus sur terre, dans ses profondeurs les plus charnelles, et seules comptaient désormais ce que leurs sens en ébullition leur transmettaient.

Se sentant défaillir dans cette étreinte charnelle, le jeune homme eu un instant l’envie de stopper le jeu là, quitte à se retrouver dans une situation embarrassante, car le chemin qu’était en train de prendre leur amitié ne souffrirait plus aucun retour en arrière une fois le pas franchi. Mais les mains, expertes, de la jeune femme eurent vite fait de balayer cette dernière étincelle de raison et d’enflammer le jeune italien tout entier d’une passion qu’il ne pourrait faire taire qu’en la faisant sienne.

Il avait délicieusement conscience de chaque parcelle de son être et encore plus quand elle y apposait ses doigts et les faisaient courir sur sa peau, traçant des sillons invisible mais brûlant. Bien vite, le t-shirt d’Enzo ne fut plus qu’un souvenir et l’eau ruissela sur le torse parfaitement musclé de bel italien le rendant aussi irrespirable que le fruit du pêcher dans lequel Eve n’avait pu résister à planter ses dents.

Bellisima… desiderio…te… adesso… Il essayait vainement d’exprimer quelque chose mais Beth le faisait taire à chaque tentative, lui ordonnant le silence de fiévreux baiser auxquels il ne se fit pas prier pour répondre… Une fois son pantalon sur ses chevilles, il s’en débarrassa rapidement, l’envoyant rejoindre son ami le t-shirt. Chaque vêtement était une entrave à la passion qu’il voulaient se témoigner et il devenait urgent de s’en débarrasser.

D’un geste précis et sûr, le jeune homme retira le t-shirt trop grand de la jeune danseuse, découvrant ainsi des trésors qui lui étaient inconnus jusqu’ici et qu’il n’avaient pas soupçonnés chez sa camarade. Ses mains accrochèrent ensuite le tissu d’une mini culotte. Instant d’hésitation, il ne savait si il devait lui arracher violemment ou tout simplement la laisser s’en défaire. Leurs sens finirent par l’emporter sur leur raison et les submergés, là, sur le carrelage froid et ruisselant d’eau des vestiaires avec une violence et une fougue qu’ils ne se connaissaient pas.

Assise, nue, sur le bord de la piscine, la jeune femme balançait paisiblement ses jambes dans l'eau fraîche, suivant du regard Enzo qui faisait des longueurs. Elle avait encore les cheveux mouillés, et ils gouttaient sur sa peau, créant de jolis bijous brillant à la pâle lumière de la lune qui s'engouffrait par la baie vitrée. Ses mains appuyées sur le rebord, elle regardait son reflet dans l'eau, tentant de mettre les choses au clair, de donner un peu de logique à ce qu'il venait de se passer. Mais une seule chose, nette et pourtant incompréhensible lui venait en tête : c'était de la simple attirance physique qu'il fallait assouvir. Pour sûr elle aimait profondément Enzo, mais avec une amitié pure, si encore pouvait-on la qualifier ainsi.

Son regard glissa sur la surface de l'eau qui ondulait en réaction aux mouvements d'Enzo, jusqu'à venir s'évader par la fenêtre jusqu'au beffroi voisin. Il n'était que deux heures du matin, et les deux jeunes gens profitaient de ce moment de calme qui suivait la tempête qu'avait été leur "rencontre". Voyant qu'Enzo venait de faire un ultime demi-tour vers elle, elle se hissa sur ses bras et glissa dans l'eau fraîche, frissonant à cette douce caresse contre sa peau. Personne n'était là pour l'arroser ou lui jeter des gerbes d'eau à la figure et ce calme la laissait seule avec elle-même, avec sa peau sur laquelle se dissipaient peu à peu l'impression des caresses du jeune homme.

Adossée à la paroi de la piscine, elle s'immergea complètement, s'accroupissant au fond de l'eau avec les yeux fermés le temps de quelques secondes, avant de remonter à la surface en lissant ses cheveux en arrière à l'aide de ses deux mains. Elle avait pied, et l'eau l'immergeait jusqu'aux épaules, troublant la vision de son corps gracile. Soupirant lentement, elle passa ses mains sur son visage pour en enlever l'eau, avant d'ouvrir les yeux sur Enzo qui approchait.

Faire quelques longueurs avait été le seul moyen que le jeune homme avait trouvé pour éteindre la fièvre qui l’avait envahi tout entier au contact de Beth, bien qu’ils aient renouvelés l’expérience à deux reprises. Une fois sous les douches et l’autre au seuil des vestiaires, la piscine étant décidément trop loin… D’une poussée puissante des bras et des jambes, il fendait l’eau jusqu’à en perdre haleine, focalisant son esprit sur autre chose que son regard ambré emprunt de désir. Chose qu’il réussit à faire l’espace de quelques secondes et qui disparu bien vite quand il posa à nouveau ses yeux sur elle. Elle était là, assise sur le rebord de la piscine, offrant sa splendeur aux rayons de la lune et au jeune homme par la même occasion…

En quelques brasses il se trouva à nouveau près d’elle et il l’observa tandis qu’elle remettait ses cheveux en place. Il lui offrit un pâle sourire, emprunt d’une légère gêne qu’ils ne se connaissaient pas avant, puis il tendit les bras pour la saisir et la serrer tout contre lui avec tendresse. Il ferma les yeux un instant et se laissa submerger par des émotions naissantes qu’il qualifia presque tout de suite de dangereuses mais auxquelles il savait il serait doux de s’abandonner.

« Beth… »

Il ne savait réellement que dire. Ils avaient franchis un cap dans leur… amitié… Un cap qu’ils savaient tout deux qu’il était impossible d’oublier et inutile d’essayer de taire…il fit remonter ses mains le long de son dos, se délectant des sensations qu’il faisait naître chez elle et qui induisaient une réaction immédiate chez lui, comme un écho brûlant de désir. Puis il mit fin à l’étreinte, du tout moins l’espace d’un instant, avec douceur mais fermeté, sachant très bien que de la garder contre lui n’était pas une bonne chose et qu’il ne saurait pas résister la tentation.

« Beth… » murmura-t-il une nouvelle fois en emprisonnant son visage entre ses mains et en apposant son front brûlant contre le sien.

Beth accueillit le retour d'Enzo avec un sourire paisible, mais il s'effaça dès qu'il la prit dans ses bras, murmurant son nom avec une douceur qu'elle n'aurait osé imaginer... Et étrangement, il sonnait comme faux dans sa bouche, comme s'il ne devait pas le dire ainsi. Et même si le coeur de la jeune femme s'arrêta de battre pendant quelques secondes, elle savait, au fond, que la voie qu'il prenait n'était pas faite pour eux, du moins, ensemble...

Elle avait voulu le repousser, mais il la tenait si fort, il la caressait si bien qu'elle perdait soudainement pied, ne lui permettant que de soupirer et de fermer les yeux. Ce fut Enzo qui mit fin à l'étreinte en premier, plongeant son regard dans le sien dans lequel il régnait la même hésitation que dans les yeux de la jeune femme désemparée. Ce désir qui les consumait tout deux, ils ne pourraient pas l'éteindre d'eux-même, même avec la plus grande volonté qui soit. Cependant, ces battements de coeur irréguliers, ils pouvaient les interrompre avant qu'il ne soit trop tard.

"Et si... On faisait un pacte ?"

S'extirpant de l'emprise d'Enzo, elle s'éloigna de lui, le regard déterminé à ne pas aller plus loin tant que les choses ne seraient mises au point.

***

La surface de l'eau était troublée par quelques vaguelettes, partant en cercles concentriques depuis un côté de la piscine. Dans la lumière blafarde qui éclairait la piscine de l'école Botticelli, l'on pouvait aisément discerner deux silhouette dont on ne savait décrire où se terminait l'une et où commençait l'autre. Le silence n'était meublé que du bruit de l'eau, et de quelques soupirs exhalés à chaque nouvelle vague...

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